Devenir écrivain Indie : Sois Productif ! + Un bilan de l’AT Ciel de Glace

tampon vecu« T’as mangé aujourd’hui? »
« Oui, enfin, peut-être, enfin non, j’écris, laisse moi tranquille, là! »
°_o

Le 5 avril était la deadline de l’appel à texte Ciel de Glace de l’Allée des Conteurs. Les résultats sont tombés, c’est Natth et Pixie qui ont gagné, bravo ! D’autant que la nouvelle de l’une d’elles était ma favorite ^-^

J’ai participé au concours en m’y prenant au dernier moment. Mais j’ai adoré le thème et je me suis laissée entraîner par mon héros (un chat-dragon) et par cette fin un peu Western que j’avais en tête dès le début. Bilan : 20.000 mots en une semaine. La nouvelle et devenu un mini roman, une novella en anglais (j’assume mon côté Van Damme). Raté!

Mais l’aventure d’écrire 20.000 mots en une semaine m’a laissée émerveillée, et bien sûre un peu brûlée, mais je ressens le besoin de faire une petite analyse de mon « exploit ». Car en tant qu’auteur qui aspire à devenir écrivain indie et un jour (je dis bien : un jour) vivre de son métier, il va falloir que j’apprenne à produire… Moi qui, d’habitude, mets deux ans à pondre un roman  avec 80% de chances de ne jamais le finir ! Que s’est-il passé ? oO

J’y vois 5 grands ingrédients, que je vais essayer de reproduire à l’avenir pour devenir écrivain !

Ingrédient 1. La contrainte technique

Tout a commencé avec le thème de l’AT et ces mots improbables à caser : Ciel de Glace, Allée, Chaudron, Maisons Biscornues. oO Ces contraintes m’envoient très vite sur une légende celtique que je n’avais jamais pensée à exploiter : le chaudron de Dagda… Le monde s’impose alors de lui-même sur Wikipédia : les tribus de Dana qui ont combattu les Fir Bolgs et Excalibur, l’épée d’acier à l’âge de bronze. C’est le principe même des ateliers d’écritures, la contrainte ouvre des voies que l’on n’aurait pas forcément pensé à explorer.

Mais surtout, la contrainte libère la créativité en détournant l’attention de notre esprit critique du processus de création. Car, croyez-le ou non, le plus gros frein à la productivité d’un écrivain, ce n’est pas sa maîtrise de l’orthographe ou son manque d’inspiration, c’est son cerveau gauche, ce petit démon qui s’obstine à le critiquer avant même qu’il ait posé le moindre mot sur le papier.

Ingrédient 2. Ne pas avoir peur de la critique

Il fallait ensuite trouver un moyen de faire du liant entre le monde imaginaire et le monde réel. Le fait que cela ne soit « qu’un concours de nouvelles » pour s’amuser et partager, non destiné à l’édition, m’a un peu libéré le cerveau. Au lieu de me casser la tête, j’ai juste repris une idée de mon roman en cours, Demon Heart, où les chats sont en fait des dragons qui ont le pouvoir de passer entre les mondes. J’ai ensuite sauté sur des idées que j’avoue avoir honteusement volées à des grands auteurs :

des démons et des êtres étranges  se battent devant un vaisseau échoué Les chats traversent les mondes en courant sur les rayons de la Lune : HP Lovecraft, La Quête onirique de Kadath l’inconnue, Une nouvelle de Démons et Merveilles

Couverture du box des Seigneurs de l'instrumentalité: Un vaisseau spatial Il existe des monstres dans l’espace noir entre les étoiles et les chats qui les combattent les voient sous forme de rats : Cordwainer Smith, Le Jeu du rat et du dragon, Une nouvelle du Cycle des Seigneurs de l’Instrumentalité

Voilà, je suis partie là-dessus, pas le temps de faire mieux. Mon côté perfectionniste a pris une claque. Mais le perfectionnisme n’est qu’une façon de s’interdire d’avancer.

Je sais que des spécialistes de l’écriture de scénarios conseillent de jeter la première idée qui nous vient à l’esprit, puis la seconde, puis… Mais alors ? L’inspiration ? Que devient notre petite muse si on lui renvoie dans la face toutes les belles paroles qu’elle nous susurre ? Elle finit par se taire…

Ingrédient 3. La contrainte de temps

Il fallait ensuite coucher sur le papier la vague idée. Pas le temps, un draft rapide de l’intrigue puis on attaque. Éternelle étudiante, je n’ai attaqué la rédaction qu’au dernier moment, i.e. le lundi pour le dimanche (et encore, je n’ai mis un coup de collier que le jeudi) en me disant : « Ce ne sera qu’une nouvelle de 3000 mots, ça s’écrit très vite ! » Raté, j’ai mal estimé les besoins de l’histoire, il en fallait beaucoup plus.

Je pense (i.e., j’ai lu sur le web) que les délais serrés, c’est efficace pour deux raisons :

Une règle en vogue chez les coachs adeptes de la semaine de 4 heures (un résumé en vidéo ici ^^) est que si on se laisse 3 heures pour accomplir une tâche qui n’en prend qu’une, alors la tâche occupera les 3 heures. Moralité, autant se mettre des délais serrés !

Mais surtout, la base des camps de type Nanowrimo c’est de libérer la créativité. L’objectif démentiel à atteindre ne laisse que peu de place à l’autocritique. C’est encore un bon moyen de faire taire le cerveau gauche. Bon, pour le tuer définitivement, je vous renvoie à la lecture du livre de Julia Cameron, critique du livre ici ^^.

Petit plus, la rédaction tombait en parallèle avec le début d’un camp d’écriture sur le mois d’avril organisé par l’Allée des Conteurs, une super communauté d’auteurs. Les camps permettent l’entraide et la motivation mutuelle. Le métier d’écrivain est solitaire. Il faut briser cette solitude. Les camps d’écriture et les cercles d’écrivains sont un bon moyen !

Ingrédient 4. L’immersion totale

Les délais serrés et la contrainte de productivité engendrent un phénomène d’immersion. Stephen King conseille ne pas pas relâcher la pression lorsque l’on tient une histoire, d’écrire tous les jours, de ne pas laisser les visages de ses personnages s’affadir. Il ne faut pas interrompre un premier jet pour aucune raison au monde.

Être bloqué n’en est pas une! Il faut écrire jusqu’à ce que les personnages trouvent la solution par eux-même et je vous jure qu’ils le feront tôt ou tard. Bon, c’est comme ça qu’on se retrouve à devoir supprimer 3000 mots d’un coup en phase d’editing, mais tant pis! oO Je n’ai lu cette méthode nulle part, c’est ma vision des choses alors je peux me tromper…

De plus, il faut veiller à limiter les perturbations et les interruptions. Pas de mails, pas de réseaux sociaux, pas de petit copain qui vous montre une vidéo marrante. C’est une règle de base de la productivité au travail. J’ai compris une chose récemment: Écrire est le travail le plus complexe que j’ai eu à faire dans ma vie. J’ai fait des boulots intellectuels mais tous, c’était de la GNOGNOTTE par rapport à la concentration que demande un roman. Il faut donc se ménager son espace à soi et savoir fermer sa porte comme au bureau. Écrire est un travail et un acte égoïste. Il faut savoir ce que l’on veut.

Ingrédient 5. La transe berserk

Encore une théorie perso à la Van Damme. Vous ne le savez peut-être pas mais votre esprit est une collection de consciences multiples réunies à un méta niveau en un tout cohérent. Autrement dit, chaque tâche que traite votre cerveau est un îlot de computing isolé. Je pense qu’écrire est un état de conscience modifié, entre la veille et le rêve, où notre cerveau se dissocie. Dans cet état, les personnages squattent chacun un bout de notre cerveau. On ne les contrôle pas, on les regarde. Je crois que Stephen King, encore lui, est très doué pour se mettre dans cet état.

La seule manière que j’ai trouvé de m’approcher de la transe, c’est LA musique. C’est un classique me direz-vous? Tout le monde a besoin de musique pour écrire! Oui, mais moi, j’ai besoin d’UNE et UNE seule musique. Ou à la rigueur, d’un groupe ou d’un style précis. Oui, je suis tarée. Mais j’ai besoin de ça pour ne pas quitter cet état de conscience propre à chaque histoire. Ainsi, chaque jour, ou après chaque interruption, il me suffit de remettre LA musique. Les émotions, les personnages, tout revient aussitôt. Que de temps gagné!

Dernier conseil, se bloquer des créneaux très long. Même l’astuce de du conditionnement par la musique n’empêche pas qu’il y a un coût d’entrée dans la tâche élevé. Il vaut mieux écrire pendant 1 heure que faire 2 sessions d’une demi heure. Perso, je table sur minimum deux heures.

Vous devez trouver bizarre que j’attache tant d’importance au temps? C’est juste qu’en comptant les contes, les nouvelles, les suites de tomes, j’ai plus de 100 histoires à écrire, à raison d’une tous les 2 ans et bien… Je ne pourrais jamais toutes les écrire avant de mourir, même si j’arrive à vivre de l’écriture et à m’y consacrer à temps plein. Le temps est mon ennemi, j’ai pas peur de devenir tarée pour le vaincre.

Petite réserve tout de même…

Bon… j’ai fait un sprint de plus de 8000 mots le vendredi en écrivant de 9h à 2h20 du matin, quasi non stop. Résultat de la semaine: Un roman mais une mega bronchite après… ça en valait la peine mais pas tous les jours s’iou plait! ^-^

Alors, il ne faut pas oublier de manger, dormir et parler à des êtres vivants ou à un canard en plastique (si si ;), ne serait-ce que parce que se changer les idées et parler de son histoire, permet aussi souvent de débloquer des problèmes, (cf. dans cet article sur la créativité, la théorie du canard en plastique).

Prochaine étape

Futur couverture d'Eochaid et le Dragon : un vieux chat sur fond de mousse acoustique irisée, une souris est posée sur sa queue.
© Mu Spark – La future couverture du roman Eochaid et le Dragon

Y’a plus qu’à corriger ce texte brut de décoffrage! Je compte utiliser la deuxième partie pour faire un petit roman que je mettrais en ligne gratuitement. J’ai déjà la couverture, ci-contre. Je cherche encore le titre, « Eochaid et le Dragon »?

 Si tu as d’autres méthodes et idées, merci de les partager en commentaire ou à m’en parler, ça m’aiderait beaucoup! Et n’hésite pas à me contredire 😉 Je dis ce que je pense mais la probabilité que je me trompe est très grande! 😀


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Auteur : Ghaan Ima

J’écris depuis 10 ans, j’ai des idées plein la tête d’univers de SFF inspirés de mangas : geeks, otakus, anarchistes sur les bords et un peu barrés.

  • Très sympa ce retour d’expérience ! Vous allez finir par me donner envie d’en écrire un tiens ! XD Même si ce serait sans doute moins intéressant.
    Je suis très impressionnée par les 8000 mots en une journée ! Bravo en tout cas !

    • ^-^ c’est Charlotte qui m’a donné l’idée avec son article
      Merci pour le bravo mais bravo à toi avec tes 1500 mots par jour, tu es un marathonien qui va dans la durée! 50kmots en un mois pour le camp d’écriture, chapeau!
      J’aimerais bien que tu partages tes méthodes pour réussir à travailler avec tant de régularité!

  • C’est vrai que les AT sont un bon moyen d’explorer de nouvelles choses, si tu cherche un bon site qui répertorie ceux dans l’imaginaire : épopées fictives est une vraie caverne d’alibaba ! Pour les mots imposés, la taverne des défis sur l’Allée devrait combler tes désirs ^^

    Pour le reste, il y a des choses avec lesquelles je me retrouve, d’autre pas du tout :p Bloquer une à deux heures, c’est impossible pour moi, je suis incapable de me concentrer aussi longtemps ! J’en étais incapable lorsque j’étais étudiante et ça ne s’est pas arrangé. Je travaille souvent par petite touches plus ou moins longues, suivant l’inspiration, une fois que je sens que c’est moins simple, je fais une pause, souvent un jeu débile sur facebook, avant de m’y remettre.

    De même, j’ai parfois besoin de lever le pied durant quelques jours ou un weekend, surtout après des périodes intensives.

    Selon les périodes et la facilité que j’ai à m’y mettre, il m’arrive souvent d’en garder sous le coude d’un jour sur l’autre pour que ce soit plus simple de m’y remettre le lendemain !

    L’utilisation de la tablette pour écrire a également eu de bons résultats, j’ai perdu l’habitude de tout relire tout le temps et j’avance vraiment.

    Enfin, plutôt que tourner en rond dans le projet en attendant que ça se débloque, je pratique les drabbles. A l’aide d’un thème, je mets mes persos en scène et les sortants du contexte. Il n’y a pas besoin d’avant, ni d’après, je me concentre juste sur une émotion, un moment et souvent, ça provoque un déclic !

    Voilà, voilà ! C’était un sacré pavé ^^

    • Oui un pavé mais super intéressant!!! Merci beaucoup Sizel! 😀
      En effet, j’ai vu pendant le camp d’écriture que vous faisiez des drabbles, je vais m’y mettre, ça a l’air magique ^^. Car comme je le disais ma méthode de laisser tourner en rond mes personnages est très chronophage, donc loin d’être parfaite! C’est juste que je pense qu’il faut pas se bloquer complètement, même si ce qu’on écrit au premier jet n’est pas parfait :p
      Pour la concentration, moi aussi j’ai souvent besoin de lever le nez, mais j’essaie de me réserver de long créneaux (même si je suis pas à 100% tout le temps). Ce que j’essaie de faire (mais ne respecte jamais) c’est de débrancher facebook et toutes les notifications du monde extérieur pendant ces moments là. Car je me distrais vite, donc je préfère prévenir…
      C’est intéressant, l’histoire de la tablette! C’est aussi un de mes problèmes. Quand je me lance dans l’écriture j’ai cette tendance à relire et corriger ce que j’ai écris la veille… Souvent je n’attaque la vraie rédaction que 30 minutes après m’être installée! Je vais tenter ta méthode…
      Merci encore pour tes conseils! 😀 😀

  • Passionnant ton retour, merci !

    D’accord avec toi sur un tas de points. Notamment la musique comme vecteur d’émotions. Quand je travaille sur plusieurs projets en même temps (c’est pas ce que je préfère mais ça arrive), j’ai une musique par projet. Comme toi, il suffit de la remettre -en boucle (vive le casque ou tes colocataires te jettent par la fenêtre), pour retrouver le ton. Et, je relis chaque fois tout le travail depuis le début avant de le continuer, pour ne pas que l’on sente la césure à la relecture. Le travail d’écriture, ce n’est pas juste le moment où le stylo (ou le clavier) est en action.

    Autre point que tu évoques : la « discipline ». Je croyais il y a de longues années que c’était une contrainte, un frein à la créativité etc. Erreur !
    On ne devient pas marathonien du jour au lendemain, mais en se posant à sa table chaque jour.

    En fait il faut s’autoriser à penser, dire et agir comme un « vrai métier », c’est-à-dire :
    1/ Un lieu de travail. Même un tout petit coin.
    2/ S’y mettre chaque jour. En lisant, un écrivant, en prenant des notes. Si j’ai un travail à rendre, je me donne un quota de signes, et je ne bouge pas de ma chaise tant que ce n’est pas terminé (enfin je m’autorise des pauses quand même, et je ne suis pas toujours aussi drastique, mais ça paie vraiment – pour moi- cette attitude)
    3/ Alterner les plages d’isolement (pas d’internet, de téléphone, de visites de copains…) à des sorties, pour se remplir l’esprit, pour échanger, discuter, s’ouvrir. On a aussi droit à des vacances en somme.
    4/ Accepter d’être payé pour ce que l’on fait 🙂

    Après, ce qui est magique (ou terrible parfois), c’est de lever le nez et de se dire : « ahhh il est déjà telle heure ! Je n’ai pas vu passer » 😉

    Je vais te lire à présent !

    • Merci Roxane!!! Je découvre donc que je ne suis pas la seule à réagir ainsi avec la musique, donc je ne suis pas folle! 😉

      Et merci de ton retour d’expérience. J’aime beaucoup ta phrase: « s’autoriser à penser, dire et agir comme un vrai métier ». C’est quelque chose que j’ai beaucoup de mal à intégrer mais je commence à prendre l’écriture au sérieux ^-^

      Tes règles sont aussi très bonnes. J’ai la fâcheuse tendance à écrire n’importe où: dans le train, dans les cafés, les macdo. La seule chose qui compte, c’est d’avoir la petite bulle créée par ma musique. Je suis d’accord avec le fait qu’il faut écrire tous les jours.
      En ce qui concerne les réseaux sociaux… je partage à 100% ton avis mais la discipline n’a jamais été mon fort…

      Bonne continuation, j’attends ta prochaine « petite lettre » ^-^ c’est toujours un plaisir de découvrir tes textes!

    • Ah mais c’est bien d’écrire n’importe où ! Je le fais aussi. J’ai toujours un carnet sur moi pour prendre des notes, écrire. Mais ça ne m’empêche pas d’avoir un bureau qui matérialise vraiment mon espace de travail et sur lequel je passe des heures chaque jour.

    • Tu as raison Roxane! Un jour j’aurais un vrai bureau avec des décos étrange et une porte qui ferme à clef! Pour l’instant, mon bureau, c’est la table du salon… Vive les budgets PVT et les apparts à Paris. Tu me diras c’est qu’une affaire de priorité ^-^
      Et le calepin, c’est une super idée. J’y pense depuis longtemps mais ne le fais jamais… Tu as vraiment de bonnes méthodes!

  • J’ai fait une formation sur la créativité et je suis d’accord sur le fait que les contraintes aide à créer et ce ne sont pas un frein loin de là. Encore des conseils qu’il faudrait que je suive à la lettre. J’en ai du boulot ^^ Bisous